Dans ce portrait sur fond de partition de la Symphonie de l'Alhambra, il y a du Gustav Malher. Semblable intensité du regard à l'affût de l'intuition de génie, prête à ciseler le mot ou la note pour une transcription universelle. Henri Collet aurait-il apprécié cette évocation ?
Lui qui considérait que sa "vraie gloire sera d'avoir révélé au monde la musique des autres". Cinquante ans ou presque après sa disparition, Henri Collet ne s'est pas trompé. Lui, ce grand oublié des festivals, des célébrations et des honneurs du répertoire aura choisi toute sa vie durant de se tenir loin des feux de la rampe. Musicologue pourtant le plus célèbre des Années Vingt , il est aussi le fondateur du "Groupe des Six" réunissant les musiciens les plus en vue de l'époque - Auric, Durey, Honneger, Milhaud, Poulenc et Taillefferre- dans une avant-garde prompte à affranchir la musique française du wagnérisme et du debussysme, ayant pour parrain un Jean Cocteau déjà complice.

Epris de l'Espagne au point d'en parcourir les chemins à dos d'âne et d'y vivre une quinzaine d'années, d'en apprendre la langue et de l'enseigner, Henri Collet est le plus espagnol des compositeurs français. Albeniz, Granados, Turina ont été ses amis. Emmanuel de Falla son confident. Artiste qui a le plus contribué au rapprochement de la pensée franco-espagnole par la musique, "consul de la musique espagnole à Paris", cet Espagnol venu de France, a pensé et décliné l'Espagne dans tous les genres musicaux : sonate, chant, quatuor, concerto, opéra.